Mutualisation des risques climatiques : un projet ambitieux mais incomplet sans ingénierie publique
La parution du rapport « Repenser la mutualisation des risques climatiques« , publié par le Haut-Commissariat à la stratégie et au plan, présente une approche novatrice dans la reconnaissance du changement climatique comme risque systémique. À l’heure où les catastrophes naturelles s’intensifient et où les coûts de sinistralité explosent, penser à des évolutions allant jusqu’à une « Sécurité sociale climatique » relève d’une démarche aussi lucide que nécessaire.
Le SNITPECT-FO note la qualité du travail mené, conjuguant logiques assurantielles, préventives et solidaires. Mais il tient aussi à alerter : toute refondation de la solidarité climatique restera incomplète si elle ignore un maillon essentiel de la chaîne d’adaptation au changement climatique : celui de l’ingénierie publique.
Une ambition à partager : solidarité et anticipation
Le rapport dresse un constat clair : le système actuel, fondé sur le régime Cat Nat et la surprime mutualisée, montre ses limites face à des risques croissants et inégalement répartis. L’analogie faite avec la création de la Sécurité sociale en 1945 est éclairante : il s’agit aujourd’hui de reconstruire un pacte collectif, incluant réparation mais aussi prévention et justice territoriale.
Sur ce point, les constats rejoignent ceux formulés dans notre « Livre vert et noir de l’adaptation au changement climatique« , qui plaide pour une approche systémique : face à l’ampleur des enjeux, il ne s’agit plus d’adapter à la marge, mais de penser un changement structurel.
L’angle mort à corriger : la capacité d’agir de la puissance publique
Mais un paradoxe majeur demeure : aucun des trois scénarios proposés ne pose la question des moyens humains et techniques nécessaires pour mettre en œuvre ces ambitions sur le terrain.
Or, le SNITPECT-FO l’affirme dans son « Livre vert et noir » : « La réduction des moyens humains et techniques dans les services de l’État fragilise les politiques d’adaptation, tout particulièrement dans les territoires les plus vulnérables ». Qui mettra en œuvre les diagnostics de vulnérabilité, la révision des plans de prévention, l’accompagnement des collectivités en zones à risques, l’évolution de la doctrine technique, si les capacités d’ingénierie publique sont continuellement érodées ?
Prévenir et s’adapter pour réduire la sinistralité
La meilleure solution organisationnelle reste celle qui permet d’éviter le sinistre. A ce titre, la très grande inégalité des territoires pour l’accès à l’ingénierie publique et les baisses drastiques de budgets et d’effectifs imposés au pôle ministériel en charge de la transition écologique sont particulièrement préoccupantes.
Construire un modèle de sécurité sociale sera d’autant plus complexe et dispendieux dès lors qu’il se bâtira sur des désert médicaux et un hôpital public fragilisé.
Une expression ministérielle attendue sur la reconnaissance de l’expertise technique
Le SNITPECT-FO appelle donc à ce que toute réflexion engagée sur le sujet intègre dans ses propositions, y compris en analyse de coût global, un scénario de réarmement technique de la puissance publique.
Les ingénieurs des travaux publics de l’État sont prêts à apporter leur contribution au défi de l’adaptation au changement climatique. À condition que leur action soit reconnue, valorisée et soutenue à la hauteur des enjeux ; l’expression de leur ministère de gestion sur ce sujet sera donc attentivement suivie.