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Tensions sur les métiers de l’ingénierie : pour une autre ambition de l’État employeur

Le rapport publié en mai 2025 par l’Institut Montaigne, « Métiers de l’ingénieur : démultiplier nos ambitions », alerte sur l’ampleur des tensions qui frappent aujourd’hui les métiers scientifiques et techniques. Son constat est clair : la France devra former chaque année près de 100 000 ingénieurs et techniciens supplémentaires pour répondre aux besoins combinés de la réindustrialisation, de la transition écologique et de la transformation numérique.

Ce diagnostic rejoint de nombreuses autres publications récentes : les travaux de l’OPIIEC sur les compétences de l’ingénierie, les alertes de l’Observatoire du BTP, ou encore les projections de France Travail sur les recrutements en tension. Une convergence rare dans le paysage des politiques publiques : les besoins sont massifs, la réponse actuelle insuffisante, et les enjeux systémiques.

Face à cela, le SNITPECT-FO partage une conviction forte : les défis qui se présentent à la puissance publique ne pourront être relevés sans un réinvestissement volontariste dans l’ingénierie publique. Et si l’on peut noter l’effort de modélisation du rapport de l’Institut Montaigne, celui-ci reste marqué par une logique de pilotage essentiellement économique, où la question du sens des missions, de l’égalité d’accès à l’expertise, et du rôle stratégique de l’État, sont relégués au second plan.

Dans son Livre vert et noir de l’adaptation au changement climatique, le SNITPECT-FO esquisse d’autres orientations : reconstruire une ingénierie publique territorialisée, organiser un pilotage de la compétence technique au sein de la puissance publique et bâtir une politique d’attractivité fondée sur la reconnaissance du haut niveau de qualification des ingénieurs publics.

L’exemple de l’ENTPE illustre concrètement cette exigence : grand établissement, elle forme les futurs ITPE avec un haut niveau scientifique, une approche intégrée des transitions et un fort taux de féminisation, déjà supérieur aux objectifs fixés dans le rapport de l’Insitut Montaigne. Cette réussite ne saurait être déconnectée du niveau d’ambition statutaire pour le corps qu’elle alimente.

Le SNITPECT-FO le réaffirme : répondre à la pénurie de compétences ne saurait se limiter à ouvrir davantage de places dans les formations. Il faut aussi recruter au bon niveau, fidéliser et valoriser. Cela implique d’en finir avec la dévalorisation statutaire de la filière technique, avec les suppressions d’effectifs dans les services de l’État et avec les orientations RH menées au mépris des spécificités des métiers techniques.

Alors que le rapport Montaigne reconnaît lui-même l’urgence de mobiliser toutes les ressources humaines disponibles, notamment dans le champ de la transition écologique, il serait paradoxal que le ministère en charge de l’Écologie continue de fragiliser sa propre compétence technique.

C’est pourquoi le SNITPECT-FO attend aujourd’hui que le ministère de gestion du corps des ITPE, prenne pleinement la mesure des attentes portées par les ingénieurs. Il en va non seulement de la capacité à agir pour les transitions de la société mais de la crédibilité même de l’action publique.

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