Circulaire du 22 juillet 2008

Cette circulaire fait suite aux décisions de la RGPP d’abandonner toute ingénierie concurrentielle. Cette circulaire avait été présentée, en version projet, au « Comité de concertation sur l’ingénierie » du 7 juillet 2008, auquel seule la FEETS-FO, parmi les organisations syndicales, était présente.

Ci-dessous la retranscription de la déclaration de la FEETS-FO lors de ce comité :
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Le compte-rendu de l’administration du comité de concertation sur l’ingénierie du 4 juin 2008 nous est apparu en décalage par rapport aux propos tenus et aux orientations prises par le secrétaire général du MEEDDAT lors de nos échanges au cours de cette réunion.
_ Par ailleurs, le conseil de modernisation des politiques publiques (CMPP) du 11 juin a reproduit les mêmes annonces destructrices que celles émises lors du CMPP du 4 avril contre l’ingénierie et contre le RST.
_ Le document stratégique ministériel du 13 juin (auquel le projet de circulaire ne fait étrangement aucune référence) ne suffit pas à répondre aux inquiétudes soulevées par les CMPP. Et plusieurs chefs de service ont traduit votre retour de la réunion du 11 juin 2008 en termes tranchés : « on arrête immédiatement toute activité d’ingénierie ».
_ Nous vous demandons donc en introduction de cette deuxième réunion de nous donner la position officielle et finale de l’administration du MEEDDAT sur l’avenir de l’ingénierie, en tenant compte des CMPP et du document du 13 juin.

De plus, cette position du MEEDDAT sur l’ingénierie ne peut ignorer l’avis de la Mission d’Evaluation et de Contrôle de l’Assemblée Nationale dans son rapport n°991du 24 juin 2008 relatif au MEEDDAT :
_ L’ingénierie publique doit, selon le conseil de modernisation des politiques publiques en date du 4 avril 2008, se désengager progressivement des tâches pouvant être prises en charge par le secteur privé et se redéployer vers les nouveaux domaines d’expertise du développement durable.
_ L’ingénierie publique, dans les faits, a déjà largement investi ces nouveaux domaines de compétence. Pour autant, elle ne peut se désengager d’un coup des domaines d’intervention traditionnels, en l’absence d’offres de services alternatives constatées et confirmées.
_ En termes d’effectifs, les prestations techniques apportées aux collectivités territoriales représentent, selon la loi de finances pour 2008, un total d’environ 11 200 équivalents temps plein travaillé (ETPT), sur un total de 17 042 pour le programme n °113 Aménagement, urbanisme et ingénierie publique.
_ Le conseil de modernisation des politiques publiques dans sa réunion du 4 avril 2008 a prescrit un redéploiement d’une partie des effectifs de l’ingénierie dite concurrentielle, « l’État n’ayant pas vocation à concurrencer l’offre privée ».
_ Cette orientation soulève au moins quatre questions.
_ Certaines prestations d’ingénierie publique étant gratuites et d’autres facturées à des niveaux peu élevés, on peut redouter que les dépenses d’ingénierie à la charge des collectivités territoriales augmentent en cas de recours à des bureaux d’études privés.
_ D’ailleurs, l’ingénierie publique est appréciée par les collectivités territoriales pour sa proximité, sa connaissance du territoire, son indépendance et sa neutralité par rapport aux entreprises du BTP. Il est loin d’être établi que le recours à l’ingénierie privée conduise à une diminution des coûts globaux de réalisation.
_ Au demeurant, pour le moment, l’ingénierie publique pour le compte des collectivités locales ne pourrait pas toujours être remplacée par des bureaux d’études concurrents privés, soit parce que, localement, il n’en existe pas, soit parce qu’ils ne disposent pas encore de compétences dans les nouveaux domaines du développement durable.
_ Enfin, en réduisant le rôle de l’ingénierie publique, l’État perdrait un moyen important d’impulsion de ses politiques territoriales, alors même qu’il inscrit le développement durable au premier rang de ses priorités.
Proposition n° 8 : Un plan national d’ingénierie du développement durable, élaboré par le MEEDDAT en concertation avec les collectivités territoriales et le secteur privé, doit établir les perspectives à dix ans des besoins, des formations, des recrutements et des filières professionnelles correspondantes.

Comment le MEEDDAT va-t-il traduire cet avis et cette proposition de la MEC ?
_ Sur les effectifs, quelle est la tendance concernant les lettres plafond et le projet de budget triennal 2009/2011 ? Pour l’ensemble de MEEDDAT et sur l’ingénierie (en services et dans le RST) en particulier.

Sur le projet de circulaire :
_ 1/ Le caractère interministériel de la circulaire (MEEDDAT et Ministère de l’Agriculture et de la Pêche – MAP) répond à notre revendication.
La suite de la concertation nationale évoquée au 2.4 pose la question du « statut » de ce comité de concertation sur l’ingénierie. Selon nous, celui-ci se doit d’être interministériel, en associant le MAP et le Ministère du Logement et de la Ville (MLV).
_ Nous demandons que ce comité de concertation soit pleinement opérationnel avec des fonctions de concertations, certes, mais surtout de pilotage et d’animation stratégique, lui conférant une position reconnue de tous et dont les décisions s’appliquent à tous. A ce titre, il nous apparaît fondamental que toutes les directions de programme concernées s’impliquent, au bon niveau, dans ce comité.
_ La représentativité de services déconcentrés doit y être assurée et, comme pour le Conseil des Services Scientifiques et Techniques (CSST), il serait intéressant d’associer les Écoles du ministère pour assurer une liaison avec la formation ainsi que l’actuelle DRAST (du futur Commissariat Général au Développement Durable) pour assurer un lien avec le CSST.

_ 2/ Le préambule doit tenir compte du document stratégique du 13 juin mais aussi de cet avis et des propositions de l’Assemblée Nationale.

_ 3/ Partie I du projet de circulaire sur l’évolution des interventions en ingénierie :
– Les 12 champs de la circulaire du 10 avril 2008 ne sauraient déterminer un cadre politique, prospectif et stratégique suffisant : d’une part ils n’ont jamais été concerté et pris dans la précipitation juste après le CMPP du 4 avril 2008 et d’autre part les nouveaux champs de l’ingénierie ne peuvent s’identifier clairement aujourd’hui alors que de nombreux arbitrages gouvernementaux et ministériels demeurent en attente.
– Comment pouvez-vous faire évoluer les interventions sans définir l’ingénierie de l’Etat (du MEEDDAT et du MAP en particulier) ?
Prendre le problème sous l’angle du « type des prestations » introduit de faux débats et aboutit à des orientations extrêmes et dangereuses. Se focaliser sur la suppression ou la défense de l’assistance à maîtrise d’ouvrage, de la maîtrise d’œuvre ou de l’assistance technique de l’État pour des raisons de solidarité et d’aménagement du territoire (ATESAT) ne fait que cacher l’absence d’ambition, de réflexion et de moyens qui prévaut dans le positionnement de l’ingénierie de l’État.

_ La question stratégique n’est donc pas de savoir quelles prestations assure l’État mais quelles politiques, quelles missions de l’État nécessitent un appui technique opérationnel pour une meilleure efficacité de l’action publique. Alors seulement il convient de s’interroger, sans préjugé, sur les modalités, les outils et par voie de conséquence les moyens nécessaires pour atteindre ces objectifs. La MEC ne dit pas autre chose !…
_ Ne mesurer la légitimité d’une intervention qu’à l’aune de son appartenance ou pas au champ concurrentiel, prétexte facile à toutes les réductions de périmètre, est un non-sens. A ce petit jeu de massacre, toute l’ingénierie est potentiellement concernée, les missions amonts ou d’expertises pas moins que la maîtrise d’œuvre et cela conduirait alors l’État à ne plus être en capacité d’assurer ses missions et le portage de ses politiques.
_ Par exemple, pouvez-vous nous expliquer ce qui restera comme activités et « compétences d’analyse, d’expertise, de conseil et de conduite de projet en dehors du champs concurrentiel pour la mise en œuvre des politiques prioritaires de l’Etat » dans le paragraphe 1.1. ?
_ Pour FO, il ne faut donc pas dissocier le devenir et la réforme de l’ingénierie pour compte de tiers de celle pour compte propre.
Les compartimenter amène invariablement à privilégier l’une au dépend de l’autre. C’est donc bien à une réflexion sur l’ensemble de l’ingénierie de l’État et au renforcement de la polyvalence et de la transversalité qu’appelle notre organisation syndicale.
_ Le paragraphe 1.3. n’est pas admissible : une cessation complète des activités de maîtrise d’œuvre dans le champs concurrentiel pour fin 2001 est contradictoire avec l’avis de la MEC mais aussi avec les parties 1.1. et 2.2.
_ Au-delà même de l’évolution des méthodes, il est essentiel de reconsidérer les missions de l’ingénierie de l’État. Pour ce faire, plutôt que d’aborder la question par le biais du type de prestation, nous considérons que la nécessaire sélection des missions doit se faire sur la base des enjeux de service public soulevés par le projet. Autrement dit, une mission de maîtrise d’œuvre peut être stratégique si elle porte sur un projet à fort enjeu (énergie, assainissement, déchets, sécurité routière, traitement des territoires en difficultés, etc.), alors qu’une mission d’assistance à maîtrise d’ouvrage peut être d’un intérêt relatif si elle porte sur un projet sans enjeu pour l’État ; et inversement.

4/ Partie II du projet de circulaire sur les modalités de mise en oeuvre :
Il nous semble que la Phase 1 (paragraphe 2.1.) doit être suivie d’un cadrage national, établi après concertation du présent comité et avec toutes les directions de programmes (du MEEDDAT et du MAP), sur la base des remontées par les DRE des réflexions départementales.
_ La rédaction des Plans de redéploiement des capacités d’ingénierie en région (PRIR), prévue en phase 2, ne peut s’effectuer selon l’unique vision du Préfet de Région.
_ Un cadrage national fixant les priorités et un contenu plus précis des PRIR doivent être communiqués aux DRE en novembre ou décembre 2008, après une réelle concertation.
_ Par voie de conséquence, le délai du 28 février 2009 devrait être repoussé.

5/ Paragraphe 2.3. relatif aux modalités d’accompagnement des agents : pourquoi écrire quelque chose quand on n’a rien à dire ni à proposer ?
_ A ce stade, le document stratégique du 13 juin suffit. La vraie question est QUAND les orientations prévues dans ce document en matière de gestion, d’accompagnement et de mesures de compensation et de formation des agents (qui ne concernent pas que les domaines de l’ingénierie) seront-elles engagées et abouties ?!

6/ Paragraphe 2.4. relatif à la concertation :
_ Le cadre de la concertation nationale doit être ce comité. Localement, ce sont les CTPS des DDE et des DDAF (et des 8 DDEA existantes) qui doivent constituer le cadre de la concertation.

Une ingénierie d’intérêt partagé, positionnée sur des champs élargis :

Comme le rapport de la MEC le propose avec insistance, il faut des à présent débattre de l’ingénierie pour « compte de tiers ». Nombre de ces prestations présentent un intérêt commun pour l’État et les collectivités. La contribution de l’État constitue un moyen de porter une politique publique, complémentaire à celui du financement ou de l’incitation à faire. Il s’agit même d’un moyen de portage plus sûr puisque la mobilisation de sa propre ingénierie apporte à l’État les meilleures garanties quant à la conformité finale à la politique publique visée. Nous demandons la définition et la mise en œuvre d’une ingénierie d’intérêt partagé centrée sur la plus-value de service public.
Si l’intérêt est partagé, les prestations doivent se faire par le biais de conventions ou d’utilisation d’outils communs qui échappent aux règles de la concurrence. De même, il est indispensable que les collectivités puissent accéder au RST hors concurrence, qu’elles participent à son pilotage et y emploient si nécessaire du personnel. Nous demandons avec insistance l’aboutissement de cette ouverture du RST (mainte fois revendiquée par FO dans le cadre du CSST, et désormais par les rapporteurs de la MEC).

La notion d’ingénierie d’intérêt partagé plaide pour la constitution de déclinaisons locales d’ingénierie publique regroupant les savoir-faire tant des services de l’État que ceux des collectivités territoriales et en particulier des conseils généraux.

Dans un tel cadre, FO considère indispensable et urgente la définition d’un projet stratégique pour l’ingénierie et le RST (d’où un besoin de cohérence entre CCI et CSST) orienté vers toutes les politiques publiques portées par le MEEDDAT et par le MAP.

Alors que la création du MEEDDAT est censée affirmer la priorité donnée aux problématiques de développement et d’aménagement durables, il est en effet pertinent et légitime de positionner l’ingénierie de l’État sur ces domaines et, en particulier, sur les priorités d’actions à retirer du « Grenelle de l’environnement » ; y compris pour ce qui concerne l’ingénierie d’intérêt partagé : ce serait un signal fort de la volonté de l’État de diffuser le développement durable à l’ensemble de la société.

Pour autant, cela ne peut pas se faire par la perte de compétence et de capacité d’intervention des autres secteurs plus « traditionnels » du ministère (installations classées, risques, eau, infrastructures, transports, sécurité routière, urbanisme, habitat, etc.).

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Circulaire téléchargeable ci-contre à gauche.

Cliquez ici pour les positions du SNITPECT sur l’ingénierie de l’Etat.

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